honestly, it's the honest ones you want to watch out for (will)

water's sweet, but blood is thicker
papa - maman - tribu
turbulent - dissipé - silence

Maman regarde ses cartes, papa sa bouteille. Maman lit dans le cristal, papa dans l'ambre.
La bouteille ambrée, présage sinistre de ce qui suivait ensuite. Les poings du géniteur, sa colère. Terreur. William est le troisième à pointer le bout de son nez chez les Cyrus. Deux grands frères déjà trop rodés aux mécanismes de la famille. Mère douce, père en colère. Papa est toujours en colère, hein. C'est un enfant joyeux, Will. Qui court dans la maison. S'évade dans le jardin, joue avec la moindre feuille morte, le moindre bâton, imagination débordante, créé des histoires, des aventures, fantastiques, héroïques, lointaines. Maman raconte des histoires, maman lit des livres. Et l'imagination grandit. Maman est si gentille. Les années passent, les coups pleuvent toujours. Maman regarde. Maman ne dit rien. Alors peu à peu, Will non plus, ne dit plus rien. Trop souvent réprimandé pour une course dans les escaliers, pour un vase brisé ou une tentative de reproduction de l'arche de Noé version insecte dans la baignoire. Les réprimandes abiment, les réprimandes sont bleues, violettes, jaunes, sur la peau du garçon. Alors il se calme. Alors il se tait. Petit à petit, perd foi en la figure maternelle. Perd foi en la réalité et s'enfonce dans l'imaginaire. Dans l'envie d'ailleurs. L'envie de liberté. Il est là mais plus vraiment là. Protection. Y a que les autres Cyrus qu'il intègre encore dans son monde. Les grands frères et puis le dernier enfant. Se serrent les coudes devant l'adversité. Tribu.

the whole world ahead, the old world behind
writing - bye school - riding horses

Les années passent. L’enfant silencieux devient un adolescent silencieux. Capable d’éclats soudains de colère. La pomme ne tombe jamais loin de l’arbre, hein ? Fâcheuse tendance à rêvasser à l’école, surtout pendant les matières qui ne l’intéressent pas. Plus tard, il sèchera purement et simplement les heures qui n’auront pas sa préférence. Un talent pour l’écriture souligné par ses professeurs et un intérêt marqué pour les cours de littérature. Écrire est un moyen d’évasion, écrire un autre monde, gribouiller des feuilles, des carnets, raturer, écrire encore et ne jamais laisser personne poser les yeux dessus. Les notes scolaires sont ainsi en dent de scie, ce qui désespère maman, convaincue que l’école serait la voie de la réussite. Mais ce ne sera pas la voie du garçon. Car ce qui botte Will, c’est le grand air. Passion pour l’équitation découverte durant l’enfance, supportée par maman. Souvent réprimandé pendant les cours lorsque durant une balade au pas, le brun se met en tête de partir au galop. Simple haussement d’épaule en guise d’excuse lorsqu’il se fait engueuler. Un peu plus d’effort s’il sent qu’on pourrait ne plus lui autoriser les sorties, à force. Le lycée terminé, il n’a pas d’autre ambition que celle de monter, aussi souvent que possible. Il rêverait de partir, aussi. Parcourir le pays à cheval. Pourtant, il ne le fait pas. Fil invisible qui le retient à Laurel, même s’il rêve d’ailleurs, trop souvent. Alors, il se contente de quitter rapidement le domicile familial. Décroche un job de petite main au sein du Redwood Ranch. Pas vraiment le ranch qui colle le mieux aux valeurs de Will. Mais qu’importe. Il a une paie, il est proche des chevaux. Il a de quoi se payer un minuscule studio en ville. Et de quoi continuer à monter. C’est tout ce dont il a besoin. Tout ce qu’il peut mettre de côté, il le fait, espérant un jour avoir son propre destrier. Au fil des années, son rôle au sein du Redwood Ranch devient plus important, et au lieu de nettoyer des écuries tout la journée, il devient guide, moniteur. Il emmène les touristes en balade, supporte leur small talk et leurs impolitesses car tout est plus supportable dès qu’il enfourche une selle. Ça vaut le coup.

they say the world was made for two
love - liberté - accident - nah, life goes on - no more horses

Début 2021 - Elle. Il n’a pas eu beaucoup de relations, William. Dur de s’engager dans un couple lorsqu’on est aussi fermé, sûrement. Lorsqu’on enfoui profondément des démons bien trop sournois. Trop monstrueux pour rester enfoui trop longtemps. Des filles, il y en a eu. Pour la nuit, pour sept nuits, pour quelques jours, semaines, mois. Mais rien qui vaudra le coup d’être raconté. Jusqu’à elle. Les étoiles s’alignent. Petit à petit, il est amoureux, Will. Et elle aussi. Tout n’est pas un long fleuve tranquille. Ils sont là, les démons. Sûrement pas aussi enfouis que l’aimerait Will. Ils font des leurs, parfois. Mais ils s’aiment. Sont heureux. Ça peut suffire, peut-être.
Fin 2022 - Une journée comme une autre. Une balade comme une autre. Aucun présage. Et tout bascule. Un cheval agité, effrayé. Une chute. Violente. Jambe brisée, traumatisme crânien. Impossibilité de remonter un cheval, impossibilité de bouger, pendant des semaines. Immobilisé. C’est à en devenir fou. Il fait des cauchemars, Will. Revit la chute, en voit d’autres. Se réveille en sueur. Mais tout va bien, qu’il répète. Se refuse à parler des cauchemars, à quiconque. Se refuse à parler des angoisses qui l’envahissent peu à peu à l’idée de remonter un cheval. C’est fini, Will. Y aura plus ce sentiment grisant de liberté. Y aura plus ce bonheur en glissant son pied à l’étrier. Y aura plus que la peur maintenant. Palpitations et poids dans la poitrine lorsqu’il s’approchera trop près.

i can’t breathe but that’s alright.
love - poker, fuck - tribu, always

Alors il démissionne. Adieu, Redwood Ranch. Pretend à tous ceux qui lui poseront la question que ça lui ait passé cette histoire de cheval. Peu convainquant, peut-être. Mais il s’en tiendra à sa version. Un moment d’errance après sa démission, Will traverse une sale période. Enchaîne les petits jobs. Se trouve un intérêt pour le poker et commence à fréquenter trop souvent les tables alors même qu’il est fauché. Les cauchemars continuent, se diversifient, sa chute n’ayant plus l’exclusivité sur les films qui défilent dans son esprit, la nuit. Maudites insomnies. C’est comme si cette chute avait été un déclencheur, une brèche qui laisse s’échapper toutes les merdes qu’il a tenté d’enfouir pendant des années. Il se renferme toujours plus, Will, et sa relation amoureuse se dégrade. Trop de non-dits, trop de secrets sûrement, après la compassion de sa moitié vient l’incompréhension, la colère, la tristesse. Des disputes, trop souvent. Pas d’effort de la part du garçon, aucun effort. Elle lui reproche d’avoir changé et c’est sûrement vrai. Elle est tombée amoureuse du Will avant l’accident. Il n’est plus cette personne, qu’il se dit. Forcé de renoncer à la passion qui l’animait. Un goût amer dans la bouche. Maudit destin. Mais ça, il n’en parle pas, prétend encore et toujours que tout va bien.
Avril 2023 - C’est la fin. Au fond, leur relation est sûrement morte au meme moment que son accident. C’est sûrement pour le mieux. C’est ce qu’il se dira, essayant de se convaincre. C’est le mieux pour elle, ça c’est sûr. L’impression de la libérer d’un poids, d’un boulet qui la tirait vers le bas. Et pour lui ? Il s’en sortira. Un cœur brisé, pas si insurmontable. Rien qu’il ne puisse pas noyer dans une pinte, rien qu’il ne puisse pas mettre de côté dans son esprit, le temps d’une main chanceuse qui lui fera gagner un petit pactole. Qu’il reperdra à la partie suivante. Addiction, vilaine. Seul, Will. Y a plus que la tribu. Y a que eux qui seront là, toujours. Les mois passent. Life goes on.

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le grand air - les treks - les livres - les clopes - l'alcool - les chevaux - les cartes - les petits carnets - les cover au piano - les chats - l'imprévu - les couchers de soleil - les levers de soleil - le café - le silence - la nourriture épicée

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les espaces fermés, claustrophobic vibes - les drogues - trop parler - les desserts - les insomnies - ranger - les dettes